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Annexe 4 - Notes sur le système Taungya et sur certaines plantes cultivées et essences forestières

Le teck (Tectona grandis) est de loin l’essence la plus appréciée dans le système taungya. Il est mis en place sous forme de boutures ou de plants issus de semis. Gmelina arborea est aussi largement utilisé. En dehors des arbres cultives pour le bois et autres produits ligneux traditionnels, on peut utiliser le système taungya pour les cultures de rapport, comme l’anacardier (Anacardium occidentale). Cette essence a été introduite avec succès sur des sites pauvres dans les savanes de la Guinée méridionale: semis selon un espacement de 2 x 4 m, avec culture intercalaire de maïs ou parfois de cotonnier. L’anacardier commence à fructifier vers la cinquième année; en Côte-d’Ivoire, sa production moyenne est de 400 kg/ha à l’âge de 15 ans, ce qui est très rentable pour les exploitants.

Lorsqu’on associe les cultures d’arbres avec celles de plantes, il semble bien qu’un plus large espacement des arbres réduise la mortalité, augmente le taux de croissance et qu’en même temps des plantes appropriées protègent le sol. De plus, l’exploitant obtient des rendements unitaires plus élevés. Un espacement moindre entre les arbres réduit fréquemment la croissance initiale en raison de la compétition accrue et exige plus tôt des soins culturaux.

L’exploitant choisit généralement les plantes cultivées conjointement aux arbres forestiers en fonction de ses habitudes agricoles et alimentaires. Les plus courantes sont: le bajara (Pennisetum typhones), l’orge commune (Hordeum vulgare), les haricots (Phaseolus spp, Vigna spp), le bhajee (Amaranthus spp), les aubergines (Solanum melongena), les choux (Brassica spp), le ricin (Ricinus communis), les piments (Capsicum spp), les colacasies (Colacasia antiquarum), le cotonnier (Gossypum spp), les concombres (Cucumis sativus), le taro (Colocasia esculenta), les pois cajans (Cajanus spp), le gingembre (Zinziber officinale), l’arachide (Arachis hypogaea), le trèfle jaune (Anthyllis vulneraria), la linette (Linum usitatissimum), la lucerne commune (Medicago sativa), la pastèque (Citrullus vulgaris), le melon (Cucumis melo), le mil (Pennisetum spp, Panica spp), la moutarde (Brassica spp), l’avoine (Avena sativa), le gombo (Hibiscus esculentus), la papaye (Carica papaya), l’ananas (Ananas comosus), les pommes de terre (Solanum tuberosum), le potiron (Cucurbita maxima), le seigle (Secale cereale), le sésame (Sesanum indicum), l’oseille de Guinée (Hibiscus sabdariffa), le soja (Glycina soja), la patate (Ipomoes batatas), le chou caraïbe (Xanthosoma sagittifolium), la tomate (Lycopersicon esculentum), le curcuma (Curcumalonga spp) et le blé (Triticum spp).

Plusieurs plantes sont d’un emploi contesté dans le système taungya et donc exclues des plantations de certains pays, par exemple la banane et le plantain (Musa spp), le manioc (Manihot utilissima), le maïs (Zea mays), le riz (Oryza sativa), la canne à sucre (Saccharum officinarium), le tabac (Nicotina tabacum) et l’igname (Dioscorea spp). La culture limitée ou l’exclusion de la banane et du plantain tient à diverses raisons; on souhaite notamment éviter l’intervention de l’homme dans les plantations (les exploitants répugnent en effet à couper ou à abandonner une plante qui continue à produire), conserver la fertilité du sol et empêcher la déformation des jeunes arbres. Toutefois, à Mayumbé, dans la République populaire du Congo, des bananiers sont exploités en association avec des plants issus de semis de Terminalia superba pendant quatre ou cinq ans dans des exploitations sylvicoles-bananeraies d’Etat avec un espacement de 12 x 4 m pour les arbres, et deux ou trois rangs intercalaires de bananiers. Le manioc est exclu au Dahomey et en Ouganda parce qu’il épuise le sol, a une longue durée de vie et atteint rapidement 2 ou 3 mètres, retardant ainsi le développement des arbres. La croissance rapide explique également l’exclusion du maïs au Malawi, à Maurice et au Sénégal. Cependant, le maïs n’a pas eu d’effets sensibles sur la mortalité du teck (provenant de boutures et de plants issus de semis) dans les plantations établies à Gambari au Nigéria, mais selon le matériel de plantation utilisé, il peut influer sur la croissance en hauteur. Le tabac est sans doute à exclure parce qu’il épuise les éléments nutritifs du sol et qu’il ne fournit pas à celui-ci un couvert suffisant, d’où le risque d’érosion.

Le riz de coteau est cultivé en association avec des arbres, notamment en Malaisie, au Sénégal, dans l’Assam et au Kerala, car il favorise la croissance des arbres en étouffant les plantes adventices. Toutefois, au Sri Lanka, la riziculture est si rentable que les exploitants feront certainement pression pour convertir la terre à ce seul usage. La canne à sucre n’est généralement pas cultivée parce qu’elle a un long cycle végétatif, qu’elle risque d’épuiser le sol et qu’elle donne beaucoup d’ombre. Néanmoins, dans les régions de l’Assam, en Inde et de la Birmanie où elle a été cultivée avec beaucoup de succès, sa présence accélère la croissance en hauteur des plants d’arbres issus de semences.

En Chine, la culture intercalaire est généralement pratiquée en sylviculture. Des cultures sont parfois laissées en place pendant une période de deux ans entre les rangées de peupliers, de Cunninghamia lanceolata et de pins (massoniana, taeda ou elliottii). Dans certaines plantations, de pins notamment, des aleurites (Aleurites spp) sont plantées en interlignes conjointement avec d’autres cultures agricoles. Elles donnent de l’huile entre la quatrième et la dixième année, puis sont abattues et le pin reste sur pied jusqu’à l’âge d’exploitation. La culture intercalaire ne sert pas seulement à remplacer le sarclage mais aussi à produire à la fois du bois et des denrées alimentaires (utilisation polyvalente des terres). Selon la qualité du sol, on pourra cultiver des patates, du soja, de l’arachide, des melons d’eau ou du maïs. Dans l’ensemble, on préfère intercaler des légumineuses car elles enrichissent le sol, servent d’engrais vert et de fourrage. Selon les cultures et la compétence de la gestion, le rendement des cultures intercalaires peut varier de 1,4 à 4 tonnes de denrées alimentaires par hectare. En certains lieux, il peut atteindre 20 tonnes/hectare de feuilles vertes qui seront utilisées pour nourrir les animaux (porcins) ou comme engrais. L’effet sur la croissance de l’arbre est très favorable. Le taux de survie de Cunninghamia avec cultures intercalaires est de 5 pour cent plus élevé et la hauteur du plant de 33 pour cent supérieure.

Le littoral méridional de la côte Pacifique de la Colombie où Cordia alliodora et Cedrela odorata sont plantés dans de petites exploitations en association avec les cultures traditionnelles de plantain, de maïs et de cacaoyer (Theobroma cacao) est un autre exemple de cultures aménagées.

Bien que de nombreux forestiers habitués à l’aspect soigné et régulier de leurs plantations, peuvent être opposés aux cultures mélangées, ce système est pratiqué non seulement pour des raisons traditionnelles, mais aussi parce qu’il est adapté à l’environnement, conserve la fertilité des sols et prévient l’érosion et le lessivage. Il se justifie aussi économiquement puisque l’on peut produire davantage à partir de cultures mélangées et que l’on utilise ainsi pleinement l’espace disponible. Une bonne gestion est un facteur important dans ce système et toute règle formulée doit être appliquée rigoureusement. Lors de l’entretien et de la récolte des cultures, en particulier des tubercules notamment, il faut veiller soigneusement à ne pas endommager les racines des arbres. Si, contrairement à la règle générale, des variétés grimpantes sont introduites, les exploitants doivent utiliser des tuteurs ou des rames (dans le cas des ignames) pour empêcher l’étouffement des plants d’arbres issus de semences. A souligner que la croissance et le rendement des cultures sont directement influencés par l’espacement et la densité des arbres. Le taux de croissance et l’ampleur relative de la couronne des essences dépendent de ces deux facteurs.

Le système taungya permet de réduire les coûts des plantations forestières, tout en contribuant à résoudre les problèmes sociaux. A Campêche, au Mexique, où les principales essences plantées sont Cedrela mexicana, Swietenia macrophylla et Cordia ciricote, les coûts nets par hectare pour les opérations de plantation et d’entretien sur cinq ans avec deux sarclages par an ont été réduits de 27 pour cent au moins (ils ont été de 58,4 dollars E.U.) par rapport aux coûts normaux grâce aux profits tirés de la récolte de maïs. Avec la mécanisation, ces coûts tombent à 18 pour cent (ils sont alors de 34,3 dollars E.U./hectare).


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