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Annexe 3 - Autres produits forestiers

La présente annexe donne des exemples d’essences et produits varies de nombreux pays assortis de quelques notes sur leurs distribution, production et utilisations. Elle s’agence comme suit:

I. NOURRITURE

A. Nourriture directe
1) Graines et noix
2) Fruits
3) Produits comestibles des palmiers
4) Champignons
5) Protéines animales
B. Fourrage

II. PRODUITS FORESTIERS GENERATEURS D’EMPLOIS OU DE REVENUS

1) Bambou
2)
a) Colophane et térébenthine (résine de pin)
b) Résines et gommes des essences feuillues
3) Tannin
4) Soie tasar
5) Gomme arabique
6) Plantes médicinales et autres plantes d’importance économique
7) Matières premières pour le papier fabriqué manuellement

III. PRODUITS FORESTIERS QUI AUGMENTENT LA PRODUCTIVITE DE LA TERRE PAR DIVERSIFICATION DES CULTURES

1) Miel et cire d’abeilles
2) Acacia senegal
3) Thea oleosa
4) Autres

I. NOURRITURE

A. Nourriture directe

1) Graines et noix

Anacardium occidentale fournit la noix de cajou bien connue et est aussi souvent utilisé comme brise-vent ou pare-feux; c’est une excellente source de nectar pour l’apiculture. Bertholettia excelsa, donne la noix du Brésil qui contient environ 66 pour cent de matières grasses, 17 pour cent de protéines et 7 pour cent de glucides et de vitamines B, est originaire des forêts amazoniennes, peut atteindre 30 à 50 m de hauteur et 1 à 2 m de diamètre et produire 250 à 500 kg de noix par an - le Brésil exporte annuellement de 30 000 à 40 000 t. de noix. Macadamia, originaire d’Australie, donne jusqu’à 150 kg/ha/an de noix. Castanea spp - châtaignier - C. sativa en Europe, C. crenata au Japon, C. mollissima en Chine et C. dentata en Amérique du Nord a toujours joué un rôle très important dans l’économie de plusieurs pays, France et Italie notamment, où les rendements annuels atteignent respectivement jusqu’à 2 000 et 3 000 kg/ha. Les châtaigniers sauvages (Castanopsis spp) abondent de l’Inde jusqu’en Indochine. Les noisettes sauvages sont utilisées comme nourriture surtout en Asie (Corylus chinensis, C. heterophylla). Pistachia vera est beaucoup cultivée dans certaines régions d’Afrique du Nord et du Proche-Orient pour ses noix et Ceratonia siliqua, plantée en Afrique du Nord dans les zones semi-arides à subhumides, produit un fruit qui contient 40 à 50 pour cent de sucre. Canarium spp, Asie du Sud-Est et région Pacifique, donne une noix qui est mangée crue, cuite ou salée. Pinus pinea, P. cembra, P. gerardiana et P. koraiensis produisent des pignons comestibles. Plusieurs essences d’Araucaria du Brésil, du Chili, de l’Australie et de la Papouasie Nouvelle-Guinée sont très appréciées pour leurs graines comestibles. Les noix de karité de Terminalia catappa et T. kaernbachii sont d’importantes cultures de rapport.

2) Fruits

L’un des exemples les plus connus est l’arbre à pain, Artocarpus incisus, planté aux fins d’ombrage et pour ses fruits; d’autres essences, comme A. integra, A. nobilis et A. attitis, produisent des fruits et des graines comestibles. Les feuilles sont utilisées comme combustible, les branches et les tiges en construction et en ameublement. La famille des manguiers est une autre source bien connue de fruits comestibles et l’essence la plus largement plantée est Mangifera indica; outre les fruits, les jeunes feuilles de M. zeylanica sont consommées comme salade verte. Prosopis juliflora (algaroba, mesquite), originaire d’Amérique mais largement introduit en Afrique et en Asie, est un autre arbre à fruits comestibles, très souvent cultivé. A 4 ans, il produit en abondance des fèves qui sont un substitut de céréales. Les fèves ou les gousses servent également d’aliments pour animaux et l’arbre exsude de la gomme de qualité commerciale, alors que les fleurs sont très mellifères. Les bonnes variétés de fèves fournissent annuellement jusqu’à 50 tonnes de farine par hectare. Des rendements similaires en farine peuvent être obtenus avec Ceratonia siliqua (caroubier) et d’autres essences poussant en zones semi-arides (Sholto Douglas, 1972(0)). Il existe d’autres arbres à fruits comestibles largement cultivés, appartenant aux genres Garcinia, Diospyros, Durio et Zizyphus. Parmi les autres essences très répandues et bien Connues pour leurs fruits figurent Mammea africana, Tamarindus indica, Balanites aegyptiaca, Cordyla pinnata, Parinari macrophylla, Parkia biglobosa et Butyrospermum paradoxum. Mentionnons tout spécialement Adansonia digitata connu sous le nom de baobab; son fruit donne une pulpe qui peut être réduite en poudre (crème de tartare) et mélangée au lait donné aux enfants; les graines (2 000 par kg) fournissent de l’huile et les jeunes feuilles sont consommées à l’état cru ou cuit. Il existe aussi des essences qui fournissent de la gomme utilisée en cuisine, par exemple Sterculia setigera et plusieurs Ficus spp.

3) Produits comestibles des palmiers

Un certain nombre de palmiers donnent des produits comestibles et de l’huile, parmi lesquels Jessenia polycarpa et Orbignya mariana, originaires du bassin de l’Amazonie. Le palmier buriti, Mauritia flexuosa et le palmier à huile (Elaeis guineesis) fournissent des fruits comestibles, de l’huile et des pousses (coeurs de palmier). La sève de Borassus aethiopum est riche en sucre, et on peut en faire du vin de palme; son fruit est aussi comestible. Phoenix paludosa produit également des coeurs de palmier comestibles et abrite un gros ver considéré par certaines communautés comme un mets délicat.

Euterpe edulis est un palmier brésilien qui produit des coeurs de palmier pouvant être exportés. En 1975, les exportations du Brésil ont atteint 7 012 223 kg (1 294 dollars E.U. la tonne) et le marché intérieur est de trois à quatre fois ce volume. La moitié du stipe est comestible, l’autre moitié est utilisée comme pieu ou bois à pâte.

Le sagoutier (Metroxylon sagu, M. rumphii, M. salomonense) donne le sagou, que l’on extrait de la moelle du tronc.

4) Champignons

Etant donné l’abondance de litière en décomposition, les forêts hébergent de nombreux champignons dont certains sont comestibles. Maintes essences abritent également des mycorrhizes sur leurs racines; lorsque les variétés sont nombreuses, on pourrait en cultiver des souches comestibles sur des plants en pépinière. Par crainte des variétés vénéneuses, peu de personnes mangent des champignons ou se limitent à une ou deux variétés; il faut une tradition locale bien établie pour pouvoir placer quelque espoir dans cette ressource, qui ne constitue pas une source majeure de calories ou de protéines. Leur plus grande contribution éventuelle à l’économie villageoise vient de ce qu’ils sont un mets délicat et cher qui peut être commercialisé. De nombreuses espèces peuvent être séchées et, de ce fait, les coûts de conservation et de conditionnement sont faibles.

Parmi les principaux champignons cultivés, citons Lentinus edodes au Japon, Volvariella volvacea en Chine ainsi que les champignons du chêne et les champignons noirs en République de Corée. Les Grecs et les Romains anciens cultivaient déjà Pholiota aererita sur le peuplier. En France, la plupart des chênaies du Massif Central sont désormais orientées vers la production de truffes Melanosporum dont le prix est d’environ 80 dollars E.U./kg. Ce produit peut procurer des revenus plus élevés que le bois. En Italie, une autre variété de truffe a été inoculée avec succès sur les racines de Pinus strobus. On a réussi à cultiver le champignon japonais, shiitake, sur des résidus de bois au Chili, et les perspectives sont bonnes sur les déchets de Nothofagus dombei puisque shiitake se multiplie de 300 pour cent en cinq ans et son cours international est de 14 dollars E.U./kg. Les champignons constituent une très importante source de revenus en République de Corée et leur culture est encouragée par les associations de forêts villageoises. En 1977, les exportations de champignons du pin se sont élevées à environ 9 millions de dollars E.U. et celles de champignons du chêne à quelque 6 millions de dollars E.U.

5) Protéines animales

Traditionnellement, les collectivités rurales sont tributaires des terres forestières pour leurs protéines animales. De nombreuses espèces sont encore consommées, allant des insectes, reptiles, amphibiens, aux poissons, oiseaux et mammifères. Malheureusement, les enquêtes nutritionnelles et socio-économiques classiques ont souvent sous-estime sinon ignoré l’incidence de la faune sur la vie quotidienne de la population rurale. Toutefois et malgré l’absence de données précises, les quelques études approfondies réalisées montrent clairement que la faune et le poisson constituent les principales sources de protéines animales de nombreuses zones rurales, notamment de celle où l’élevage du bétail domestique est difficile. En Afrique, d’après les enquêtes faites au Ghana et au Nigéria, jusqu’à 70 pour cent de la viande produite localement proviendrait d’animaux sauvages et particulièrement de certains petits animaux des genres Thryonomys, Lepus et Cricetomys gamlianus, des escargots et insectes. En Amérique du Sud, le capybara, rongeur géant pesant de 40 à 60 kilos a été pendant longtemps intensivement exploité. En Argentine, il est chassé sur tout le territoire pour sa viande et son cuir, alors qu’au Venezuela, plusieurs ranchs l’élèvent commercialement.

De même, en Asie, de nombreuses communautés rurales consomment la faune sauvage; toutefois, d’autres produits de la faune contribuent au développement des communautés locales. Citons, par exemple, la production des bois de cervidés. Le rendement moyen en bois est de 2 kg par cerf qui, une fois séché, peut être vendu pour 200 à 250 dollars E.U. le kilo. En Papouasie Nouvelle-Guinée, on capture de jeunes crocodiles que l’on élève dans des enclos jusqu’à ce qu’ils atteignent la taille optimale pour en exploiter la peau.

Afin de chiffrer un taux d’exploitation soutenue, à des fins alimentaires ou non, des diverses espèces de faune dans une zone, il faut évaluer leur population. Cette évaluation doit être de nature dynamique et s’attacher non seulement aux séries de population, mais aussi à la répartition des espèces à l’intérieur de l’habitat. Les informations fournies permettent de fixer des quotas de capture et de choisir les méthodes et époques de capture les plus appropriées.

Les réglementations sanitaires et vétérinaires de certains pays imposent de nombreuses contraintes au traitement de la faune à des fins alimentaires. Tant que l’exploitation repose sur une base traditionnelle, elle ne pose habituellement aucun problème, mais lorsqu’elle devient officielle, les réglementations et restrictions conçues à l’égard du cheptel domestique entrent en jeu et empêchent l’adoption de méthodes traditionnelles de conservation de la viande. En conséquence, le processus de conservation de la viande le plus facile dans des conditions tropicales est une adaptation des techniques traditionnelles de séchage et de fumage.

La production de poisson dans les forêts marécageuses ou les mangroves représente une importante source de protéines. Ces deux types de forêts offrent au poisson un habitat protecteur très précieux. Dans la zone de Tonlesap, Kampuchea démocratique, durant la période des crues, les populations de poissons se dispersent dans la forêt marécageuse avoisinante qui leur fournit une nourriture telle qu’ils grandissent très vite. La production de poisson dans ces eaux serait 10 fois supérieure à celle des lieux de pêche de l’Atlantique (10 t/km² contre 1 t/km²). Les mangroves servent principalement de zone de reproduction de nombreux organismes marins, par exemple les mollusques ou les crustacés qui jouent un rôle important dans l’économie et le régime alimentaire locaux. Les mangroves du delta du Gange et des péninsules indochinoise et malaysienne sont particulièrement riches en poissons, moules et crevettes qui donnent lieu à une industrie florissante. La détérioration des écosystèmes des mangroves entraîne la détérioration du réseau alimentaire et des lieux de reproduction des organismes marins, d’où une diminution de la production de poisson.

B. Fourrage

On peut ramasser les feuillages ou fruits de nombreuses essences pour les donner aux animaux, soit comme fourrage brut, soit après un simple traitement.

Les essences destinées à la production fourragère doivent répondre aux critères suivants:

- adaptabilité: elles doivent pouvoir s’établir et se maintenir dans l’environnement retenu;

- appétence: l’essence - arbre ou arbuste - doit être facilement acceptée par les animaux. L’appétence varie d’une espèce animale à l’autre et est influencée par les rapports plante/animal/environnement.

- valeur nutritive: l’appétence influence l’absorption, mais certaines plantes très appétences peuvent avoir une faible valeur nutritionnelle. Cela signifie qu’outre l’appétence qui entraîne l’absorption, les plantes fourragères devraient contenir, en grandes quantités, des éléments nutritifs divers, dont le plus important serait les protéines. Cette substance nutritive est habituellement considérée à l’état brut.

Les cosses et feuilles d’Acacia arabica contiennent 15 pour cent de protéines brutes. Les feuilles de certaines autres essences en contiennent jusqu’à 20 pour cent (Albizia lebbeck, Prosopis specifera);

- production et croissance: la production de gros volumes de fourrage dès les premières années, est un élément d’importance économique. Dans les régions du Proche-Orient et d’Afrique du Nord, ce critère est satisfait par l’emploi de genres d’arbres résistant à la sécheresse, à croissance rapide et à haut rendement, comme Atriplex, Opuntia et Acacia;

- capacité de renouvellement: Les essences fourragères peuvent servir de pâture soit directement, soit indirectement (ébranchage, cueillette donnée à la ferme). La capacité des essences à se renouveler rapidement en produisant de nouveaux bourgeons sur les tiges broutées et coupées est un facteur important;

- absence de toxicité: Avant d’introduire des essences fourragères, il conviendrait d’étudier soigneusement les risques de toxicité.

II. PRODUITS FORESTIERS GENERATEURS D’EMPLOIS OU DE REVENUS

1) Bambou

Plusieurs variétés de bambou sont très cultivées dans de nombreux pays, et principalement en Asie du Sud-Est. Les diverses variétés ont des utilisations innombrables: pousses pour la consommation humaine, fourrage pour les chevaux, matériaux de construction, mobilier, cannes à pêche, bois à pâte, fibres pour la fabrication de papier et, de plus, elles servent de brise-vent, pour la stabilisation des berges et dans la lutte contre l’érosion. Un produit médicinal utile et cher, le “tabashee” est tiré des jointures de plusieurs variétés dont Melocanna bambusoides. Les variétés cultivées les plus appréciées sont Phyllostachys edulis et P. pubescens. Dans les climats tempérés, Phyllostachus spp peut produire annuellement jusqu’à 15 m³/ha alors que le rendement de variétés tropicales comme Dandrocalamus, Bambusa et Melocanna est plus faible. Les pousses de bambou mises en boîtes et exportées constituent une bonne source de revenus. L’Amérique et l’Europe occidentale dont la demande dépasse l’offre sont des marchés ouverts à ce produit. Avec des apports d’engrais et une gestion convenables, un hectare de bambou peut produire annuellement de 500 à 1 000 kg de pousses et de 2 à 3 tonnes de bambou sec. La culture des bambous peut donner aux exploitants un bon revenu annuel au bout de 3 à 4 ans.

2)

a) Colophone et térébenthine

Les pins (Pinus spp) produisent un exsudat au niveau du cambium lorsqu’ils sont blessés. Cet exsudat est un mélange complexe de terpènes et d’acides gras, appelé résine à l’état brut, qui, raffinée, donne la térébenthine et la colophane, produits commerciaux importants. Le rendement en résine diffère selon les essences. Les principales essences commerciales sont P. elliottii, P. palustris, P. silvestris et P. merkusii, mais de nombreuses autres essences sont utilisées dans certaines régions. Les rendements devront être déterminés à la lumière d’essais.

Le raffinage de la résine à l’état brut n’est pas difficile mais il faut traiter une certaine quantité minimale pour qu’une installation soit rentable. Si le pays ne possède pas d’installations de raffinage, la commercialisation de la résine à l’état brut pourrait se révéler malaisée. Les cours mondiaux de la colophone et de la térébenthine fluctuent fortement et il faut en tenir dûment compte lorsque l’on envisage cette activité. Pour les pays en développement, la production de la résine à l’état brut présente l’avantage d’exiger un fort apport de main-d’oeuvre et un investissement minimal en capital. L’opération de raffinage est techniquement simple mais la construction d’une raffinerie de dimension économique exige de gros capitaux.

b) Résines et gommes d’essences feuillues

De nombreuses essences feuillues, notamment celles des tropiques, donnent des résines et gommes commerciables. Citons notamment l’Acacia spp (gomme arabique), Diptercocarpus spp (résines de type damar) et Manilkara spp (balata).

Comme pour le point 2 a), la collecte des résines est une activité à fort coefficient de main-d’oeuvre et habituellement à faible intensité capitalistique. En général, les résines sont exportées telles quelles et traitées dans les grands centres de consommation. Cependant, les résines ont parfois des usages traditionnels locaux que l’on devrait toujours encourager puisque les besoins en produits industriels importés sont ainsi réduits.

3) Tannin

Les tannins sont des substances polyphénoliques complexes que l’on trouve dans l’écorce, le bois et les graines de certains arbres. Ils servent principalement à la conservation du cuir, mais sont aussi utilisés en teinture et dans l’industrie chimique. Il existe deux catégories de tannins: les tannins hydrolysables et les tannins condensés. Tous les deux sont utilisés pour le tannage. A l’échelle commerciale, on extrait, à l’aide de l’eau, le tannin soluble contenu dans le bois et l’écorce défibrés ou découpés, puis on fait évaporer l’eau pour obtenir un tannin solide ou, parfois, une solution concentrée à usage industriel direct.

Parmi les essences qui produisent des tannins industriels, figurent, pour l’écorce, Acacia, surtout Acacia mearnsii, diverses essences de mangrove (Rhizophora, Avicennia, etc.), le chêne (Quercus spp), le châtaignier (Castanea spp), certains pins, notamment Pinus radiata, pour les cosses de fruit, Acacia nilotica, pour le bois et les feuilles, certains eucalyptus (E. redunca, E. exserta), et pour le bois, (Quebracho colodrado). Pour être rentable le bois et l’écorce doivent produire au moins dix pour cent de tannin; les essences énumérées en donnent de 10 à 30 pour cent.

Lorsque le tannin doit servir directement au niveau du village pour le tannage du cuir, il convient de récolter l’écorce ou le bois, de les déchiqueter et d’en extraire le tannin, puis de préparer une liqueur suffisamment forte et directement utilisable. La préparation d’extraits solides destinés au marché, opération complexe et techniquement difficile, ne devrait pas être tentée sur une petite échelle.

4) Soie tasar

La soie commerciale provient pour l’essentiel de l’élevage de vers (Bambys mori) qui doivent être nourris exclusivement des feuilles des mûriers blancs et noirs (Morus spp). Mais le matériel brut est produit de plus en plus par les vers à soie dits tasar qui se nourrissent des feuilles de divers arbres des zones tropicales, subtropicales et tempérées. La soie tasar dont les filaments jaunes et inégaux sont plus grossiers, plus résistants et plus courts que la soie normale cultivée, est produite depuis des siècles par des tribus des hautes-terres et des forêts.

La culture de la soie tasar est appelée sériciculture sauvage ou forestière, la soie étant sécrétée par diverses espèces du genre Antheraea (Saturniidae), en tout, 36 espèces et 40 formes ont été enregistrées. A. mylitta est actuellement la seule espèce exploitée commercialement sous les tropiques. L’insecte tasar des zones tempérées est un hybride interspécifique, A. proylei; c’est lui qui produit la soie tasar la plus fine.

L’espèce tropicale, A. mylitta, se nourrit principalement sur Terminalia tomentosa, T. arjuna, Shorea robusta, mais aussi sur deux douzaines d’autres essences, dont Zizyphus mauritiana, Terminalia paniculata, Anogeissus latifolia, Syzigium cumini, Careya arborea, Lagerstroemia parvifolia et Hardwickia binata. L’hybride des zones tempérées, A. proylei, est principalement élevée sur les chênes - Quercus serrata, Q. incana, Q. dealbata et Q. himalayana.

5) Gomme arabique

Des nombreuses espèces d’Acacia, seules A. senegal et A. laeta sécrètent de la gomme arabique, substance qui fait l’objet d’un commerce intensif depuis plus de 2 000 ans. La gomme arabique est utilisée en médecine, dans l’industrie textile et alimentaire et dans la préparation des peintures et de l’encre d’imprimerie.

La gomme est récoltée durant la saison sèche - on découpe et on enlève sur les branches un morceau d’écorce de 2 à 3 cm de large sur 30 à 40 cm de long; trois semaines plus tard, la gomme s’écoule et forme une boule de 5 à 10 cm. Le nombre moyen de boules par arbre est de 10 à 15 et le rendement par arbre de 100 à 200 grammes; entre 7 et 15 ans la production de l’arbre est maximale. (Booth, 1966 (0); Giffard, 1975 (0)).

6) Plantes médicinales et autres plantes d’importance économique

La santé d’une très grande partie de la population des pays en développement - que l’on estime à 84 pour cent en Inde et au Pakistan - dépend quasi exclusivement de médicaments indigènes et on note une augmentation rapide de l’utilisation mondiale de médicaments homéopathiques, ce qui donne aux plantes médicinales d’excellentes perspectives de développement. Il faudrait entreprendre l’inventaire et l’examen attentif des plantes existant dans la forêt et effectuer l’étude systématique de leurs aspects cliniques, pharmacologiques, toxicologiques, chimiques et pharmacognostiques, en vue de leur exploitation commerciale.

Afin d’éviter tout risque d’extermination des essences par une collecte trop complète des spécimens poussant à l’état sauvage, notamment lorsque les structures reproductives sont recueillies, il convient: i) de cultiver la plante dans des enclos en mettant en défense des secteurs de forêt où la culture et l’irrigation éventuelles peuvent être effectuées avec profit; ii) de propager la plante dans son habitat naturel en interdisant la collecte dans certaines zones; iii) d’amener les paysans à laisser un reliquat du système radiculaire de la plante (comme c’est le cas pour l’ipecacuanha au Brésil) et de limiter la collecte à des plantes ayant atteint une certaine taille.

Il existe plusieurs milliers d’essences d’arbres et d’arbustes économiquement intéressants sous l’angle pharmacologique et chimique. Rien qu’en Inde, plus de 700 essences ont été identifiées et décrites (Kanny, 1973 (0)). Parmi les plantes médicinales les plus appréciées sur le marché mondial et qui peuvent être plantées et cultivées figurent: Artemisia mantina, A. vulgaris, Colchicum lutem, Digitalis purpurea, Atropa belladona, Crocus sativum (safran), Coriandrum sativum, Cephaelis acuminata (ipecacuanha), Foeniculum vulgare (fenouil), et Zingiber officinale (gingembre).

Les plantes qui produisent des matières colorantes peuvent aussi trouver leur place dans les forêts communautaires, comme par exemple l’indigo (Indigofera spp) qui jouit d’un important marché d’exportation et est de plus en plus planté au Salvador. Les épices peuvent également être une source de revenus pour la collectivité; le cardamone qui produit une épice très demandée est cultivé au Sri Lanka sous couvert forestier.

7) Matières premières pour le papier fabriqué manuellement

Les zones rurales de nombreux pays en développement souffrent d’une grave pénurie de papier à des fins éducatives. Cette pénurie pourrait, tout au moins en partie, être couverte par les collectivités locales elles-mêmes qui fabriqueraient à la main le papier des cahiers scolaires et autres papiers d’écriture.

Pour fabriquer des papiers de qualité inférieure, il faut un minimum de produits chimiques, de matériel et de qualifications. Comme toute l’opération est manuelle, elle exige un gros effort de main-d’oeuvre sans recours à des sources d’énergie extérieures.

Les matières premières fibreuses nécessaires pourraient être fournies par les forêts locales. On pourrait ainsi utiliser l’écorce de certaines plantes ligneuses comme Broussonetia papyrifera alors que le bambou, les palmes, les stipes de bananiers, les roseaux et les graminées fourniraient en abondance la matière première.

En République de Corée, des villages fabriquent manuellement avec des graminées locales (kudzu) du papier tenture destine surtout à l’exportation. Selon les estimations, les revenus ont atteint 27 millions de dollars E.U. en 1977.

III. PRODUITS FORESTIERS QUI AUGMENTENT LA PRODUCTIVITE DE LA TERRE PAR UNE DIVERSIFICATION DES CULTURES

1) Miel et cire d’abeilles (Crane, 1975 (0); Razafindrakoto, 1972 (0); Smith, 1960 (0)).

Le produit non fibreux le plus répandu dans les forêts tropicales et subtropicales est certainement le rayon de miel, combinaison commode de miel - aliment à base d’hydrates de carbone - aliment précieux très prisé - et la cire d’abeilles - produit de rapport exportable. L’apiculture est une industrie qui convient parfaitement aux pays en développement car elle exige peu de capitaux et ne pèse virtuellement pas sur les ressources naturelles. L’apiculture peut être pratiquée en liaison avec l’agriculture de subsistance ou l’agriculture moderne à toute échelle voulue.

L’apiculture ne devrait pas être considérée comme une industrie isolée, mais comme faisant partie intégrante d’un système d’aménagement forestier qui utilise une ressource forestière qui serait autrement perdue.

La quantité totale de miel et de cire d’abeilles produite dans une zone donnée dépend: a) du rendement en nectar et en pollen des plantes, b) de l’activité des butineuses, c) du nombre d’abeilles et d) des conditions atmosphériques, facteur qui détermine le niveau de réalisation du potentiel des plantes et des abeilles. Le partage de la production totale entre les abeilles et l’apiculteur dépend du milieu et de la gestion des essaims. Dans les zones pauvres ou l’apiculture ne fait pas l’objet d’une exploitation rationnelle, l’apiculteur récolte moins de 5 pour cent de la production totale. Dans les zones favorables et avec une gestion moderne, il récoltera de 30 à 40 pour cent. Avec une espèce d’abeille donnée et dans un environnement donné, la récolte peut être très fortement accrue en introduisant des améliorations mineures dans le matériel et les méthodes de gestion des apiculteurs.

Avec des ruches traditionnelles et fixes, les rendements en miel dépassent rarement 7 kg par ruche et le rendement moyen est bien inférieur. La moyenne mondiale, avec les ruches modernes à cadre, est de 15 à 20 kg, mais dans certains pays, comme l’Australie, des rendements moyens de 200 kg par colonie, voire de 350 kg, sont régulièrement signalés. Récemment, plusieurs modèles de ruches “de transit” ont été mis au point pour une gestion à fort coefficient de main-d’oeuvre; elles offrent les avantages des cadres mobiles sans présenter leur complexité et le coût de fabrication.

D’après l’expérience acquise à ce jour avec ces ruches, les rendements en miel peuvent presque atteindre ceux obtenus avec les ruches à cadre, mais les manipulations sont difficilement mécanisables. Avec les ruches traditionnelles, le rapport cire/abeille est de 1:15; il est bien inférieur avec l’emploi de ruches à cadre, et de méthodes modernes d’extraction du miel.

Plusieurs espèces et de nombreux écotypes d’abeilles sont actuellement “exploités” dans les zones tropicales et subtropicales. Les abeilles ne sont pas des animaux domestiques en ce sens qu’elles ne peuvent être gardées en captivité. L’apiculteur ne peut empêcher ses abeilles de se reproduire avec des éléments sauvages. En conséquence, la première étape des programmes d’apiculture est l’introduction de modèles améliorés de matériel et une formation appropriée des apiculteurs à l’exportation des abeilles indigènes. Après quoi, on pourra envisager de remplacer graduellement la colonie indigène par des espèces améliorées pour obtenir des souches plus faciles à gérer. Dans les zones ou il n’existe pas d’abeilles indigènes, on pourra introduire des animaux améliorés soigneusement sélectionnés.

Avant d’entreprendre un programme d’apiculture, il est nécessaire d’apprendre à connaître les plantes à nectar et à pollen de la région. La connaissance des plantes méllifères des forêts tropicales et subtropicales étant à présent limitée, la meilleure source d’informations est habituellement l’apiculteur traditionnel local. Crane (1975 (0) a récemment fait le relevé des 150 plantes mellifères les plus importantes du monde). En Amérique centrale et du Sud, les principaux arbres actuellement utilises sont: Roystonea spp, Piscidia piscipula, Gymnopodium antigonoides, Haematoxylon campechianum, et Citrus spp. En Afrique, ce sont: Citrus spp, Eucalyptus spp, Brachystegia spp, Julbernardia spp et Acacia spp, alors qu’en Asie, Tilia spp et Nephelium litchi fournissent la plus grande partie du miel commercialisé. Il existe de nombreux autres arbres mellifères qui n’ont pas été mentionnés en raison de leur distribution plus restreinte.

Lorsque l’on plante des arbres à usage multiple, on peut tenir compte des abeilles de plusieurs manières: a) premièrement, on peut choisir des essences ou des provenances qui produisent en abondance un nectar de haute qualité. La plupart des eucalyptus, plantés dans la zone écologique voulue, sont de bonnes sources de miel. Ainsi E. maidenii et E. paniculata ont une production optimale dans certaines zones semi-arides alors que E. saligna et E. grandis ne donnent que de petites quantités de miel de faible qualité dans les mêmes conditions. Prosopis juliflora peut être une bonne source de nectar dans les zones semi-arides. b) Deuxièmement, on peut planter les unes à côté des autres des essences qui fleurissent à des époques différentes afin de prolonger la période de production de miel. c) Troisièmement, l’action bénéfique des abeilles dans la pollinisation des cultures à fruits et à noix peut être mise à profit par une répartition appropriée des ruchers dans les plantations.

Les dépenses en capital sont très modestes dans l’apiculture avec les ruches traditionnelles faites de paille, de grumes creusées, d’écorce d’arbre, d’argile ou de roseaux que l’apiculteur fabrique lui-même. Une personne travaillant à temps partiel peut s’occuper au maximum de 50 ruches et aura besoin de 25 à 30 dollars E.U. pour les vêtements de protection et l’enfumoir et d’un montant équivalent pour les récipients à miel. Les ruches modernes à cadre peuvent coûter chacune de 25 à 40 dollars E.U. et être ou non utilisées avec un matériel moderne d’extraction du miel que pourraient se partager plusieurs apiculteurs d’un même village. Les ruches “de transit” coûtent de 5 à 15 dollars E.U. selon les matériaux utilisés et les possibilités locales de fabrication. Dans sa phase initiale, un programme de développement de l’apiculture devrait associer l’intensification de l’apiculture traditionnelle et l’introduction de matériel et de méthodes modernes.

2) Acacia senegal

Cet arbre fournit, outre la gomme arabique (voir le point II (5)), du fourrage, du bois de feu et des poteaux et son écorce donne du tannin. C’est une essence qui fixe l’azote, ce qui est important pour la régénération des sols.

3) Thea oleosa

Cette plante est très adaptable à des conditions climatiques et écologiques variées, pourvu que le milieu soit au sud du 33e parallèle Nord, au-dessous de 800 m d’altitude et reçoive annuellement 700 mm de pluie. Elle commence à produire vers 4 à 5 ans et continue pendant 100 ans. Chaque hectare de T. oleosa peut donner annuellement 75 kg d’huile et 225 kg de tourteaux utilisés pour l’élevage des porcins. Le fumier des porcins est un bon engrais qui augmente le rendement des cultures. En Chine, des centaines de milliers d’hectares sont actuellement plantés de T. oleosa.

4) Autres essences

Parmi la large gamme d’essences à usage multiples qui n’ont pas été mentionnées auparavant, figurent: Argania spinosa, originaire du Maroc, qui produit du bois de feu, des feuilles servant de fourrage et une noix dont on extrait de l’huile comestible. Leucaena leucocephala fixe l’azote, donne du bois de feu, des poteaux et du fourrage et est également utilisé pour la délimitation des terres en Thaïlande du nord. Sesbania aculeata, légumineuse semi-annuelle, fixe l’azote, fournit un engrais vert utilisé pour la bonification des terres dés zones tant salines qu’alcalines, produit des graines, feuilles et branches qui peuvent servir de fourrage, et on extrait des graines une gomme d’usage industriel. Cette plante fournit également de la filasse pour cordage et une pulpe à fibres courtes de première qualité pour la fabrication du papier et de la rayonne. Sesbania grandiflora fixe l’azote, fournit des poteaux et se prête à la trituration; son écorce donne du tannin et ses fleurs sont consommées comme légume. Tamarindus indica donne de l’ombre et fournit du bois de construction; ses feuilles et fruits se prêtent à la consommation humaine et la pulpe du fruit est utilisée à des fins médicinales.


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